Quel que soit le nom qu’on lui donne, la pratique de la réduction participe de toutes les approches traditionnelles d’Orient et d’Occident. Au-delà des spécificités propres à chaque École, la conversion du regard demeure toujours le pivot de la démarche.
Dans un exposé très clair, Tenzin Wangyal Rinpoché souligne l’universalité et la nécessité de ce retour à soi, en soi, vers cette essence silencieuse, calme, spacieuse, sans forme ni couleurs, au-delà du monde des sensations, des émotions et des idées, au-delà de la souffrance.
En montrant comment nous cherchons aveuglément un refuge dans les choses extérieures, y compris nos sensations agréables, nos chères opinions, philosophies et images que nous avons de nous-mêmes, il rejoint clairement ce qu’Husserl qualifiait d’ »attitude naturelle ». Cette attitude de réactions conditionnés ne fait que cultiver la souffrance.
Face à n’importe quelle difficulté, seul un retournement de l’attention permet de briser cette chaîne automatique. Et le meilleur moyen de dépasser notre souffrance est de la regarder en face jusqu’à reconnaître que ce regard en est libre, comme le ciel qui n’est pas affecté par les nuages qui passent.
Cela demande d’abord de ramener l’attention sur le corps, de le laisser se détendre souffle après souffle; puis d’écouter le silence, pour s’ouvrir en amont à une immobilité de plus en plus profonde et spacieuse, pleine de force, libre de peurs et de problèmes, dans laquelle les tensions finissent toujours par se dissoudre, vers laquelle la confiance va commencer naturellement à se porter.
Cette attitude d’ouverture ne coupe pas du monde, au contraire, elle lui laisse toute la place pour être et se donner à voir dans toute sa beauté et son harmonieuse expression. De ce point de vue, les écritures sacrés n’ont d’importance que parce qu’elles nous rappellent à ce « refuge » sans adresse, où le « moi » qui pense naître, faire, avoir des problème, vieillir, souffrir et mourir a disparu pour laisser la place à la paix d’un espace d’accueil naturellement respectueux, tolérant et conciliateur, toujours prêt à embrasser la vie.
Auteur : Pierre Bonnasse